Le camp

Se soigner

Les camps du Sud de la France s’ouvrent dans des circonstances dramatiques : les réfugiés de la guerre d’Espagne arrivent épuisés par le trajet, la faim, le froid. Les civils, et plus encore les militaires, sont souvent blessés, parfois gravement. Beaucoup d’internés du Vernet sont déjà âgés, malades, ou blessés à leur arrivée dans le camp.

La précipitation de l’ouverture des camps, le manque de moyens, les pénuries, les conditions de vie dans les camps, tout va contribuer à aggraver la situation. L’administration fait face à des pénuries de nourriture, de charbon, de vêtement, d’essence, et bien sûr de médicaments. Rien ne permet de mettre en place des mesures sanitaires de base. Non seulement ces conditions dramatiques sont dénoncées par les internés, mais elles sont mentionnées par les rapports administratifs qui pointent les conséquences de l’internement sur l’état de santé général.

Une salle de l’Hôpital. Extrait d’un rapport du Ministère de l’Intérieur du 31/12/1941 Source : Archives Nationales cote AN F/715094

Le taux des malades était toujours au dessus de vingt-cinq pour cent dans toutes les baraques, quoique les simulateurs fussent sévèrement punis.

Arthur Koestler, La lie de la terre, p. 109

Au Vernet d’Ariège, les internés sont soumis à une obligation de travail, quelles que soient les conditions météorologiques : terrassement des routes, aménagement des espaces du camp… ils doivent manier pioches et pelles plusieurs heures par jour. Ce travail très physique est harassant, et pour des hommes sous-alimentés, à peine chaussés et vêtus, épuisés par le froid ou la chaleur, ces exigences de travail entraînent de nombreuses maladies et blessures, parfois la mort.

Carlos Duchatellier ©Coll. Amicale du camp de concentration du Vernet d’Ariège.

Progressivement, les hommes internés au Vernet et en capacité de travailler sont envoyés vers d’autres lieux, notamment via l’organisation Todt qui recrute pour les chantiers de l’Atlantique. En 1944, il ne reste au camp que des hommes très âgés, infirmes ou souffrants. Les maladies de la peau et les affections gastro-intestinales se répandent.

Carlos Duchatellier, 4 décembre 1941 ©Coll. Amicale du camp de concentration du Vernet d’Ariège.

Au milieu de la vague de froid, une nouvelle épidémie se déclara, une sorte de diarrhée qui forçait les hommes à sortir de la baraque, cinq ou six fois pendant la nuit, et les latrines étaient en plein air. Les vieux ne pouvaient absolument pas y aller. On imagine sans peine le résultat.

Arthur Koestler, La lie de la terre

Le Camp dispose d’une baraque considérée comme l’infirmerie, d’une baraque « hôpital » et d’un ou plusieurs médecins selon les périodes. Cependant, les rapports d’inspection pointent l’extrême vétusté de ces baraques. Même l’infirmerie civile, dédiée aux gardiens, est insalubre. La promiscuité, l’impossibilité d’hospitaliser les internés et le manque de médicaments et de matériel favorisent les épidémies et les complications graves.

Baraque réservée aux cachectiques Extrait d’un rapport du Ministère de l’Intérieur du 31 décembre 1941 © Archives Nationales. AN F/715094